Le sommeil et toi

« Nous avons traversé des milliers d’années sans « méthodes pour endormir les enfants », et cela n’a pas posé de problèmes particuliers. Ils finissaient toujours par s’endormir. Tous finissent par dormir, un jour ou l’autre. N’écoutez pas les alarmistes. »

– Dr Rosa Jové –

5 ans… 5 ans auront été nécessaires pour que tu finisses donc par t’endormir.

J’en ai bavé tu sais. Je ne compte plus les heures de sommeil perdues à tout jamais, la sensation de fatigue qui m’habitait à certains moments, le fait aujourd’hui que je me sente partiellement vidée de ma substance. Je crois fermement que le manque de sommeil peut être à l’origine d’une forme de folie humaine.

Il y a eu les longues insomnies de ces tout aussi longs mois de grossesse, les premières 72h qui ont suivi la naissance où je n’ai pas fermé l’oeil, les réveils toutes les 2h pour t’allaiter durant 6 mois, les nuits hachées par tes réveils les mois qui ont suivis, cette insupportable hyper vigilance qui me tenait en veille et me permettait de distinguer une respiration différente d’une autre, une toux, quelques pleurs, un cauchemar, une insomnie.

Est-ce que tu respires ?

J’ai maudis toutes ces nuits où tu t’éveillais à 1h, 3h, 4h sans pouvoir te rendormir, tu gazouillais durant 2h alors que je priais l’univers.

J’ai versé des litres de larmes de désespoir, de colère, de culpabilité, de tristesse, d’impuissance. Quelle douleur que cette ambivalence de mère entre ce que je savais être au service et ce que j’étais en capacité de donner…

Et alors que les nuits prenaient un rythme plus « humain », selon mes critères, le moment du coucher est devenu « problématique » : impossible de quitter la chambre sans que tu ne sois endormi. Je sentais dans mes tripes que tu ne jouais pas, que ce que certains appellent caprices ou manipulation – d’abord n’existent que dans leurs croyances d’adultes- ensuite étaient en fait un appel authentique à prendre soin de tes besoins, de proximité peut-être, de contact, de présence et de sécurité sans aucun doute. Et à la fois, plus le temps passait, plus ces moments devenaient insupportables pour moi. Je les appréhendais tellement…

Avec le recul aujourd’hui, et malgré mes lectures et la conscience qui était la mienne à l’époque, je peux observer que je ne t’ai pas complètement fait confiance pour la question du coucher.

Je voulais que tu dormes parce que J’ETAIS fatiguée.

Avec les conséquences qui ont été celles que nous avons connues : te border parfois pendant plus d’1h30 et faire une croix sur nos soirées à 2, avec papa. Des semaines durant.

Je me souviens avoir dit à ton père un soir que je n’en pouvais plus, que je ne pouvais plus assumer le coucher, que je ne voulais plus assumer, que je n’avais plus la patience, que cela me mettait hors de moi, que tu le sentais et que ce n’était pas au service de notre relation. C’était tout le contraire de ce que je voulais vivre avec toi et c’était pourtant tout ce que j’étais en capacité de t’offrir à ces moments-là. J’étais à ce que j’appelle un point de rupture et je me remercie d’avoir crié au secours en partageant ma vulnérabilité.

Ton papa a assuré comme un chef durant de longues semaines. On forme une équipe d’enfer tu sais, lui et moi?

Ces soirées m’ont permis de prendre un peu de recul, de sortir la tête hors de l’eau, de respirer simplement. J’ai recommencé à assurer le coucher, en alternance avec papa, reliée en conscience à mon intention et à ce que je voulais vivre avec toi. Cela m’a soutenu. Parfois pas. Et j’ai accueilli que ce n’était parfois pas.

3 longues années ont été nécessaires pour que tu sois en mesure de t’endormir sans que papa ou moi ne soyons à tes côtés.

Ce soir, après le rituel du coucher, je t’ai embrassé de tout mon coeur, t’ai dit que je t’aimais et t’ai souhaité bonne nuit. Voilà quelques semaines qu’un nouvel équilibre est installé. Je sais, pour avoir entendu tes petits pas de souris sur le plancher, que tu es allé te chercher un livre et que tu l’as compulsé avant d’éteindre la lampe de chevet ❤

Il y a toujours une petite part de moi, quelque part, qui se dit qu’elle aurait aimé vivre ces moments de mise au lit plus sereinement et qui espère que cela n’a pas laissé de « blessures » à l’intérieur de ton coeur.

Et puis il y a une part, plutôt bien assise à l’intérieur de moi, qui se reconnaît dans son humanité avec beaucoup de force, de courage, de détermination, de patience, de douceur, d’humilité et d’amour.

Est-ce que je suis une guerrière ? Complètement. Nous le sommes toutes! ❤

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