– Partage d’expérience sur la question du « mensonge » chez les enfants entre 3 et 4 ans –
Alors que je prépare le repas du soir, Merlin arrive dans la cuisine, un bol vide entre les mains qu’il me présente en me disant très sérieusement : « Regarde maman, un fantôme a mangé tous mes bonbons ». Ce bol, il l’avait rempli la veille d’un petit paquet de noisettes enrobées de chocolat, auxquelles il a droit une fois de temps à autre. Il m’avait demandé de lui ouvrir le sachet, de tout renverser dans le bol et de prendre le bol avec lui au salon « pour le surveiller ». Je lui avais dit oui, en conscience de mon intention : lui faire confiance, à la hauteur de ce qui est possible pour lui.
C’est en me rappelant cette part de responsabilité lorsqu’il m’a présenté le bol vide que j’ai pu prendre un temps de recul (sérieusement, quel enfant de 3 ans et demi résiste à un bol de noisettes au chocolat sans broncher ?). Et cela m’a permis également de vérifier si je n’avais réellement aucun projet sur Merlin lorsque je lui ai dit oui. Ce qui était le cas ici.
Je lui dis, sur le ton de l’humour : « Moi, je crois que tu as un petit ventre tout rond rempli de chocolats ».
Merlin : « Non, non, c’est le fantôme, maman, c’est lui qui a tout mangé ».
Je tente de me relier à lui en lui disant combien je comprends qu’il n’est pas simple de résister à tout un bol de noisettes aux chocolats installé devant son nez (et celui de son fantôme) et que, moi aussi, j’aurais sans doute été séduite.
Il me sourit.
Je poursuis en lui partageant cependant que je suis contrariée dans la mesure où j’ai à coeur qu’il ne remplisse pas son ventre de sucreries, et encore moins juste avant le repas. Je lui propose dorénavant de garder précieusement un oeil sur les chocolats à la cuisine et d’établir une règle plus claire sur ce qu’il peut manger et à quel moment (avec des mots qui soient audibles pour lui évidemment). Je termine en lui disant que son fantôme est un coquin et sans doute très gourmand.
Il me répond « d’accord », avant de s’enfuir en courant dans un éclat de rire.
De plus en plus d’auteurs, et notamment Faber et King dont je m’inspire ici, nous rassurent sur le fait qu’il est normal et commun qu’un enfant dise – ce que nous considérons comme – un mensonge. Apprendre à mentir serait même une étape importante dans le développement cognitif de l’enfant.
À la fois, il nous importe en tant que parent ou adulte référent de lui permettre de découvrir la différence entre la vérité et le mensonge et les raisons pour lesquelles notre préférence est qu’il dise la vérité. Le challenge, en notre qualité de parent, est de nous relier à ce qui se vit pour l’enfant, en évitant de l’enfermer dans une case, comme celle de « menteur ».
Rappelons-nous que notre positon d’adulte nous permet de prendre de la hauteur. Au lieu d’accuser et/ou de soumettre notre enfant à un interrogatoire :
* « déclarons l’évidence » (j’aime ce terme de Faber et King) : « Moi, je crois que tu as un petit ventre tout rond rempli de chocolats ». Si l’on souhaite le transformer en Observation au sens de la Communication Consciente et Responsable, je dirais : « quand tu me dis que le fantôme a mangé tous les chocolats… »
* partageons-lui ensuite notre Sentiment : … Je suis contrariée…
* et notre Besoin, nourri ou pas : … dans la mesure où j’ai à coeur que tu ne remplisse pas ton ventre de sucreries, et encore moins juste avant le repas – besoin de prendre soin de sa pleine santé par ex.-
* pour terminer par une Demande (« Je nous demande d’être plus attentifs la prochaine fois sur ce que l’on fait de ce sachet de chocolats de sorte à ce que nous nous y retrouvions tous les deux »).
J’ai à coeur de terminer cet article sur la notion suivante : accepter l’idée que le mensonge est une étape naturelle soutient notre posture d’accompagnant dans le cheminement de l’enfant. Plus nous accueillerons notre enfant dans qui il est et ce qu’il vit, plus nous lui ferons part de notre compréhension, plus sa sécurité intérieure sera renforcée et plus il aura l’élan de faire preuve d’honnêteté. Souvenons-nous que l’enfant peut aussi mentir, vers ses 4 ans, le plus souvent par inquiétude ou peur de notre jugement.
Et lorsque notre enfant ment, à nos yeux, et que nous sommes stimulés, prenons le temps de vérifier, une fois encore, et avant toute chose, ce que cela dit de nous.
Source qui soutient la rédaction de cet article : « Parler pour que les tout-petits écoutent » – Joanna Faber et Julie King
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